PROTECTION DES ANIMAUX

Onze ans après sa première nuit dans les bois, Daniel est toujours là. Ce Liévinois, sans domicile fixe, ne demande pas l'aumône.

Il ne réclame ni logement, ni nourriture, ni argent... Il veut juste récupérer son ami Rex, un berger allemand enlevé par le refuge intercommunal de Lens-Liévin.
Daniel ne peut s'empêcher de pleurer. Et cela fait plusieurs semaines que ça dure. Non, Daniel ne s'apitoie pas sur son sort. Pourtant, il pourrait. Sans domicile fixe depuis onze ans, ce Liévinois vit dans un abri de fortune qu'il a construit de ses propres mains. Un peu de tôle. Quelques branchages et du matériel de récupération lui suffisent pour passer 365 jours par an au milieu de nulle part.
À 61 ans, le petit homme à la casquette vissée sur le crâne est loin de couler des jours heureux...

 
Black et Rex, ses raisons de survivre
Car Daniel ne vit pas seul dans son enclos au milieu des bois. Depuis qu'il est à la rue, il s'est entouré de deux fidèles compagnons : Black et Rex. Deux chiens qui lui tiennent compagnie et qui l'aident à surmonter sa solitude. Mais aussi à trouver du courage et une raison de vivre. En vérité, Black et Rex sont ses deux seuls amis... Dans l'enclos au milieu du bois, les deux chiens vivent librement sous le regard bienveillant de Daniel. Il ne les quitte jamais, sauf quand il s'agit d'aller leur chercher à manger. Il attache alors fermement le Berger allemand et le petit chien à une laisse en métal rattachée à l'abri. Et lorsqu'il revient de la boucherie, les trois amis partagent ensemble le repas. Sauf ce jour du mercredi 8 février... « Je suis allé à la boucherie du Val de Souchez pour récupérer quelques os, comme je le fais habituellement, explique Daniel. J'ai laissé Black et Rex, seuls enfermés dans l'enclos et attachés à l'abri. Et lorsque je suis revenu, ils n'étaient plus là ». Qu'est-il alors arrivé à ces deux chiens ? C'est la question que Daniel se pose. Daniel apprend un peu plus tard que des sapeurs-pompiers seraient intervenus dans la matinée suite à un avis de recherche lancé sur sa personne. Des sapeurs-pompiers qui auraient aperçu les chiens en parfaite santé et ne présentant aucun danger... Ils seraient alors repartis. Quelques minutes plus tard, Viviane, une voisine, aurait vu passer la fourrière. « Je n'ai pas vu les pompiers mais, en revanche, j'ai vu la fourrière intervenir dans l'enclos, affirme-t-elle. C'était aux alentours de 13h. Ils sont venus sous prétexte que les chiens étaient dangereux, non vaccinés et non tatoués. Arrêtons cette mascarade ! Cela fait plus de dix ans que les chiens sont ici et il n'y a jamais eu d'accident ».

Une fourrière pas exempte de tout reproche...
D'après Viviane, la fourrière aurait mis les gros moyens pour interpeller les deux chiens. Armés d'un bouclier et d'une grande perche, les agents de la fourrière auraient embarqué les deux chiens dans la camionnette. Une information confirmée par une source proche de l'enquête. « Rex a montré les crocs, c'est sûr, affirme Daniel, le SDF. Lorsque vous vivez dix ans en pleine liberté et que du jour au lendemain des humains arrivent avec des armes sur votre territoire, le chien réagit forcément ». Daniel ne sait plus quoi faire. Il sait que ses deux chiens sont à la fourrière, mais il ne sait pas comment les récupérer. Viviane, une Liévinoise qui habite à quelques centaines de mètres de l'abri de fortune, décide de l'aider en frappant à plusieurs portes pour récupérer Black et Rex. « Daniel, quelques riverains le connaissent. Il ne demande jamais rien, n'a rien volé, et il est toujours poli, explique-t-elle. Lorsque j'ai vu son état suite à la disparition de ses chiens, je ne pouvais pas rester les bras croisés. On lui a retiré ses meilleurs compagnons, ceux qui lui permettaient de tenir encore debout... ».

Un SDF qui se prive de manger pour ses chiens
Dans la rue, les avis sont unanimes : Daniel se prive de manger pour donner quelques morceaux de viande à ses deux compagnons. C'est un maître exemplaire. Si ses chiens ne sont ni tatoués ni vaccinés, c'est parce que Daniel n'a pas les ressources nécessaires pour les régulariser. Et puis lorsqu'on vit dans la rue depuis onze ans, on a d'autres priorités... Après avoir interpellé les associations de protection d'animaux (Brigitte Bardot, 30 millions d'amis) ou les collectivités (mairies de Lens, Liévin, communauté d'agglomération), Viviane se rend au refuge intercommunal en compagnie de Daniel pour récupérer Rex et Black. « La secrétaire du refuge intercommunal m'a littéralement envoyée balader en prétextant que les chiens n'étaient ni tatoués ni vaccinés. Je comprends leur décision, c'est normal, reconnaît-elle. Mais à partir du moment où la SPA s'engage exceptionnellement à vacciner les chiens gratuitement, je ne vois pas où est le problème. Plusieurs riverains veulent même se cotiser pour payer le tatouage ! »

 
Seul le maire peut décider de l'euthanasie
Devant l'insistance de la Liévinoise et la tristesse affichée de Daniel, le refuge intercommunal décide de lui rendre Black. Mais pas Rex, le Berger allemand. « On a demandé à le voir mais on nous a refusé l'accès, affirment Viviane et Daniel. Comme le veut la loi, un vétérinaire est alors intervenu pour une expertise comportementale du chien. Mais lorsqu'on a vu Rex, il était méconnaissable. Il était fou, il redevenait sauvage. » Daniel ne peut supporter de voir son chien dans cet état. Il fond en larmes devant les grognements de Rex. Pour les deux Liévinois, c'est l'attitude des agents de la fourrière et du refuge qui ont mis le chien dans cet état. « Ils avaient des combinaisons anti-morsure, des grandes perches pour attraper le chien, se souvient Daniel. C'est normal que la bête devienne incontrôlable après un mois dans cette cage de 3m². Avant, il n'était pas comme ça. » Alors aujourd'hui, quel est l'avenir de Rex ? Seul le maire, Jean-Pierre Kucheida, a le pouvoir de décider. Soit il le rend à son maître, soit il est euthanasié. D'après nos informations, une seconde expertise comportementale devrait avoir lieu dans les prochains jours. Après, ce sera au maire de décider.

Adrien JUSTINE- L'Avenir de l'Artois

Vous pouvez écrire au maire de Liévin

pour le soutenir :      Jean-Pierre KUCHEIDA

                                 45 Edouard Vaillant

                                  62800 LIEVIN

adresse e mail :          contact@lievin.fr